La conférence RECONNECTE 2023 visait à réunir des personnes qui travaillent dans le domaine de la philanthropie afin qu’elles puissent partager leurs idées et leurs points de vue et apprendre les unes des autres. La séance « Soutenir les nouveaux arrivants et les immigrants », animée par Marina Nuri du World Education Services (WES) Mariam Assefa Fund, a réuni Yara Younis de RADIUS SFU Refugee Livelihood Lab, Syed Hussan de Migrant Workers Alliance for Change et Frances Pace de la Oakville Community Foundation pour discuter de la façon de mieux soutenir les personnes qui ont déménagé au Canada afin de saisir de nouvelles occasions ou qui ont été forcées de quitter leur pays d’origine.
La séance était dirigée par le Mariam Assefa Fund, qui est la branche philanthropique de WES, une entreprise d’économie sociale à but non lucratif qui soutient l’intégration sur les plans éducatif, économique et social des immigrants, des réfugiés et des étudiants étrangers. Au moyen de subventions, d’investissements à retombées sociales et de partenariats, le Mariam Assefa Fund de WES a pour objectif de créer des économies et des communautés plus inclusives aux États-Unis et au Canada. Ce fonds soutient les efforts visant à s’assurer que tous les immigrants et les réfugiés peuvent atteindre leurs objectifs et s’épanouir.
Cette séance a été très populaire. La salle était bondée, et il y avait aussi des gens dans le couloir. Les gens débordaient d’enthousiasme et d’idées et étaient prêts à écouter et à apprendre. Les panélistes ont exprimé leur point de vue sur les raisons pour lesquelles les bailleurs de fonds ne devraient pas négliger les communautés d’immigrants et de réfugiés ainsi que sur la manière dont la philanthropie pourrait le mieux soutenir ces communautés. Des dirigeants de fondations communautaires, d’autres personnes du milieu et des délégations ukrainiennes ont pris part à la rencontre et se sont concentrés sur les solutions. L’une des solutions qui s’est dégagée est le soutien aux organismes dirigés par des réfugiés et des immigrants qui incarnent le principe « rien pour nous, sans nous ».
Malgré la perception générale selon laquelle les programmes et les organismes axés sur les nouveaux arrivants sont déjà bien financés par le gouvernement canadien, il existe de nombreux écarts et de nombreuses lacunes dans le système, laissant ainsi plus d’un million de personnes avec un accès limité, voire inexistant, aux soutiens et aux services. Les organismes philanthropiques ont la possibilité de financer des solutions qui favorisent la réussite des nouveaux arrivants au Canada.
L’organisme de Syed Hussan, la Migrant Workers Alliance for Change (MWAC), fait partie du réseau national Migrant Rights Network et accomplit un important travail de sensibilisation et de soutien direct en faveur des travailleurs temporaires, des travailleurs sans papiers et des étudiants étrangers qui occupent des postes essentiels. On compte un demi-million de personnes sans papiers au Canada, et plus d’un million de travailleurs étrangers temporaires. Bien qu’elles soient des membres essentiels de nos communautés, ces personnes sont les plus exposées à l’exploitation et aux abus de la part des employeurs, en raison de leur statut d’immigrant. Ces travailleurs n’ont pas accès aux services gouvernementaux. Par conséquent, le financement disponible pour des organismes comme la MWAC est très limité.
« Chaque année, 1,2 million de migrants entrent au Canada, auxquels s’ajoutent un demi‑million de personnes sans papiers. Ces nombres sont bien plus élevés que le nombre de résidents permanents ou d’immigrants. Les migrants sont confrontés à l’exploitation au travail, au refus de services de base, tels que les soins de santé universels et à la séparation d’avec leur famille. Malgré ces exclusions, les migrants s’organisent dans les fermes et les usines, sur les campus d’établissements postsecondaires et dans les communautés, précisant leurs revendications et prenant des mesures pour obtenir ce qu’ils demandent par l’entremise d’organismes comme le nôtre. Et la migration temporaire n’est pas distincte des autres enjeux. Lorsqu’il y a 1,7 million de personnes qui peuvent être sous-payées, c’est toute l’économie qui est touchée; lorsqu’il y a 1,7 million de personnes qui sont forcées d’accéder à des soins de santé privés ou de payer beaucoup plus cher pour leurs études, ce sont tous nos services qui sont touchés. Que vous vous intéressiez à la lutte contre la pauvreté, aux droits des femmes, aux changements climatiques ou à d’autres enjeux, les migrants sont en première ligne de la crise et au premier plan du changement. »
Syed Hussan, Migrant Workers Alliance for Change
Même pour les organismes qui desservent des populations « admissibles », comme les réfugiés et les nouveaux arrivants, il existe encore des obstacles à l’accès au financement, en particulier s’ils effectuent un travail plus novateur, axé sur le changement des systèmes. Yara Younis, qui travaille au RADIUS Refugee Livelihood Lab, qui fait partie de l’Université Simon Fraser, a parlé des difficultés auxquelles fait face son équipe dirigée par des femmes autochtones, noires et de couleur pour obtenir du financement. Confrontées à de nombreuses idées fausses sur elles-mêmes et sur leur travail novateur de soutien aux innovateurs sociaux issus des communautés de nouveaux arrivants et de réfugiés, Yara et ses collègues passent beaucoup de temps à expliquer aux bailleurs de fonds que le travail de changement des systèmes requiert du temps, de la volonté, de la réflexion et, surtout, de la confiance.
« Les bailleurs de fonds qui soutiennent les migrants et les réfugiés doivent étendre leurs services et leurs critères d’admissibilité à tous les types de statuts qui existent au Canada. Souvent, les personnes détenant un statut temporaire, les demandeurs d’asile et les personnes sans papiers exlus dans tous les aspects de la vie. Il est essentiel que les bailleurs de fonds suivent l’exemple de ces communautés touchées, qui sont de plus en plus confrontées aux défis systémiques qu’elles seules peuvent comprendre en raison de leur expérience unique. Les moyens de subsistance des migrants et des réfugiés ne sont pas une tendance à laquelle les bailleurs de fonds peuvent se référer. Ils doivent tenir compte des communautés qui s’installent au Canada quotidiennement et qui manquent cruellement de soutien en termes d’accès à l’emploi, à l’éducation, au logement, à la communauté, au soutien financier et à bien d’autres choses encore. La philanthropie fondée sur la confiance est l’approche idéale pour travailler avec les groupes de migrants et de réfugiés qui doivent souvent faire face à des circonstances qui changent rapidement et qui doivent s’adapter pour survivre. Dans l’ensemble, les bailleurs de fonds devraient surtout faciliter l’accès au financement pour toutes les personnes migrantes et réfugiées, quel que soit leur statut, et écouter tout en prenant du recul lorsqu’ils utilisent leurs connaissances pour diriger et orienter les initiatives. »
Yara Younis, RADIUS SFU Refugee Livelihood Lab
Frances Pace a apporté la voix d’une fondation communautaire qui participe à ce travail. Elle estime que la séance a été très instructive.
Le Oakville Resettlement Fund a été créé en 2015, pendant la crise des réfugiés syriens, et il a aidé à répondre aux besoins locaux des immigrants et des réfugiés, en particulier les réfugiés syriens et afghans. Ce fonds soutient désormais les réfugiés ukrainiens dans la région d’Oakville.
« Participer à la séance “Soutenir les nouveaux arrivants et les immigrants” au cours de la conférence m’inquiétait, car je ne suis pas à l’aise de parler en public. J’étais l’une des panélistes, aux côtés de deux personnes extrêmement compétentes (Syed et Yara), qui m’ont laissée en admiration devant leurs efforts inlassables. En réfléchissant à la séance et à ce qui devrait être dit, j’ai compris que, même si nous n’étions pas en première ligne pour soutenir directement les efforts humanitaires, le travail que nous faisions, à la Oakville Community Foundation pour aider les nouveaux arrivants, était un message important à partager avec d’autres fondations communautaires sur ce qui peut être fait à l’échelle locale. J’ai parlé de notre fonds, le Oakville Resettlement Fund, qui a été et qui continue d’être un effort concerté, à l’échelle de la communauté, de notre conseil d’administration, de nos donateurs et des organismes locaux pour apporter un soutien et une lueur d’espoir aux personnes qui fuient leur pays et se réinstallent dans notre communauté. C’est notre solution locale à un problème mondial. Une solution pour laquelle j’étais heureuse, en fin de compte, de sortir de ma zone de confort pour venir en parler publiquement. »
Frances Pace, Oakville Community Foundation
Marina Nuri, qui est la directrice de la stratégie et des programmes du WES Mariam Assefa Fund pour le Canada, a déclaré qu’elle était reconnaissante envers Yara et Syed, des partenaires bénéficiaires de longue date, d’avoir participé aux échanges.
« J’ai été ravie de constater que notre séance suscitait autant d’intérêt et j’ai repris espoir en observant que les bailleurs de fonds présents dans la salle étaient réellement touchés par ce que Syed et Yara ont dit au sujet des communautés qu’ils soutiennent et des obstacles qu’ils doivent franchir pour obtenir du financement. Je pense que de nombreux bailleurs de fonds ne se rendent pas compte qu’il existe un si grand manque de financement et d’énormes inégalités systémiques en ce qui concerne les immigrants et les réfugiés. Il est vraiment nécessaire que la philanthropie ne s’intéresse plus uniquement à ces communautés lorsqu’il y a une crise humanitaire, et qu’elle adopte une approche plus réfléchie et collaborative pour répondre aux besoins et aux obstacles systémiques auxquels font face les diverses communautés d’immigrants et de réfugiés. Ces populations sont au cœur du tissu social canadien depuis des années, et la communauté dans son ensemble ne peut pas être prospère si une partie aussi importante de celle-ci est confrontée à de graves inégalités et à un manque de financement. C’est pourquoi je pense que les fondations communautaires ont ici une énorme influence à exercer. »
Marina Nuri, World Education Services (WES) Mariam Assefa Fund
Pour en savoir plus sur le WES Mariam Assefa Fund et sur le soutien qu’il apporte aux réfugiés et aux immigrants, consultez son site Web.