TCe billet est une contribution de Andrea Dicks, présidente de Fondations communautaires du Canada, rédigé en réponse à des questions d’entrevue formulées par Ontario Nonprofit Network (ONN). Il a d’abord été publié par ONN (en anglais).

Lorsqu’il est question d’aider les organismes à but non lucratif (OBNL) et les organismes de bienfaisance à offrir des conditions de travail décent, leurs bailleurs de fonds – tant les gouvernements que les autres – jouent un rôle considérable. Autrement dit, plutôt que de faire partie du problème, ils peuvent contribuer à la solution.

  1. Vous avez passé les années formatrices au début de votre carrière dans des fondations et le milieu philanthropique au sens large. Comment ces premières expériences de travail influencent-elles votre idée du travail décent dans le secteur?

J’ai encore l’impression d’être « au début » de ma carrière! Ces quelques expériences en lien avec le secteur philanthropique, autant dans de petits organismes très efficaces que dans des entreprises et de jeunes organisations, ont été bénéfiques.

Pour commencer, j’ai travaillé dans un organisme de bienfaisance pour enfants. J’ai adoré ce travail, et c’est là que j’ai découvert une culture ancrée dans un engagement commun pour une cause. Toutefois, cela impliquait une certaine « normalisation » ou des attentes sous-entendues concernant les heures supplémentaires et le travail en soirée et pendant les fins de semaine pour organiser des événements ou y participer. À un certain moment, j’occupais un rôle dans lequel j’étais sur appel 24 heures sur 24 au cas où une famille devait joindre l’organisme. J’ai intériorisé ce style de travail au point où je le considérais comme « normal ». J’ai commencé il n’y a pas si longtemps à comprendre à quel point cela m’a suivie et à quel point ce n’est pas sain.

Après avoir quitté cet organisme, j’ai travaillé en philanthropie des entreprises pour PwC. Pendant les premiers mois, j’étais en admiration de tous les systèmes en place, que ce soit le soutien technique, le système de conseils de voyage ou l’allocation pour les cours de mise en forme, et ce ne sont là que quelques exemples. J’étais constamment surprise et ravie du soutien que l’entreprise offrait à ses employés. Cela dit, la culture des heures de travail sans fin y régnait tout autant.

Le public a cette perception des OBNL selon laquelle nous devons être très malins dans la gestion de nos dépenses et, par conséquent, nous n’investissons jamais en nous, c’est-à-dire dans notre équipe, nos équipements, nos locaux, etc. C’est évident dans les commentaires au sujet des frais généraux et des « dépenses d’exploitation ». Pourtant, ce sont les employés des OBNL qui rendent possible et font le travail si important pour notre collectivité et nos infrastructures sociales. Nous avons besoin d’aller au fond de cette ambivalence.

Aujourd’hui, dans mon travail à Fondations communautaires du Canada, je suis consciente que je maintiens des habitudes acquises tôt dans ma carrière. Plus précisément, je perpétue des pratiques de travail non viables. Je travaille à changer ces habitudes, pour moi-même, mais aussi pour que mon équipe puisse suivre un meilleur exemple et soit témoin d’un meilleur équilibre. C’est vrai que je continue à travailler de longues heures parce que j’adore mon travail, mais je fais attention à garder l’équilibre en utilisant des heures compensatoires, des congés, etc.

Les dirigeants dans le secteur doivent mettre fin à cette glorification de l’employé surmené, sous-payé et qui s’occupe de tout sauf de lui-même. Les priorités et le langage du travail décent m’ont aidée à comprendre que ce n’est pas mon appréciation d’un concept ou d’une pratique qui compte, mais comment les autres me voient les appliquer. 

  1. Pourquoi le travail décent, et surtout le travail décent pour les femmes, devrait-il être un sujet de préoccupation pour les fondations communautaires?

Les données disponibles nous montrent que l’inégalité des genres est la plus grande violation des droits de la personne (en anglais) au monde. Et l’un des endroits où cette réalité est omniprésente, ce sont les milieux de travail (en anglais). Sachant cela, nous avons l’occasion et l’obligation, ici et maintenant, de changer le cours des choses et l’expérience de travail de tous. Je pense à toutes les personnes dont le trajet pour se rendre au travail est long ou complexe, ou dont la sécurité individuelle est mise en péril en public en raison de leur emploi. Je pense aussi à toutes les personnes qui gagnent le salaire minimum ou qui ont perdu leur emploi en raison de la COVID-19. Le milieu philanthropique a une chance en or de faire bouger les choses en matière de travail décent et d’égalité des genres, un sujet intimement lié. Hélas, tous ne concrétisent pas le travail décent d’une façon qui reflète l’urgence de la situation. En fait, dans le contexte actuel, beaucoup de bailleurs de fonds agissent comme si le temps n’avait pas de limite. Le temps est une monnaie du pouvoir. Lorsque nous prenons notre temps sans reconnaître que ce sont notre pouvoir et nos privilèges qui nous permettent de le faire, nous agissons à l’encontre du transfert et du partage de ce pouvoir. Autrement dit, nous le monopolisons. L’infinité du temps et l’absence d’un sentiment d’urgence créent une culture où l’on se permet de remettre en question des données valables et de partir dans d’éternelles missions d’apprentissage, de réflexion et de consultation. Nous prenons notre temps pour élaborer des stratégies, rédiger des documents de réflexion, organiser des rondes de discussions pour, en fin de compte, avancer étape par étape. L’expérience centenaire des fondations communautaires au Canada nous montre que cette approche ne produit guère le changement systémique auquel nous aspirons. Tendons-nous le miroir et changeons nos manières de faire en intégrant le travail décent dans nos pratiques. Voilà le changement que, collectivement, nous pouvons réaliser dès maintenant.

Le travail décent, un enjeu d’égalité des genres et de justice raciale

  1. Ardente défenseure de l’égalité des genres, vous avez soulevé l’intersectionnalité de différentes questions sociales complexes, p. ex. l’égalité des genres et la justice raciale dans le contexte du dérèglement climatique. Que pensez-vous de l’affirmation « la justice économique pour les femmes passe par des investissements dans des secteurs avec une main-d’œuvre à majorité féminine »?

En principe, je suis d’accord. En même temps, au Canada, nous avons cette conviction et attitude que tout est au beau fixe, surtout en ce qui concerne l’égalité des genres. Mais si vous regardez les données et si vous écoutez les femmes et les personnes de diverses identités de genre, vous vous rendez compte que ce n’est pas tout à fait vrai.

Comme bailleurs de fonds, et comme humains, nous avons la responsabilité collective de faire en sorte que toutes les femmes ont accès à des emplois qui leur offrent de la sécurité, de l’équité et de la flexibilité. Et ce, peu importe qu’elles commencent leur carrière, reviennent au bureau après un congé ou retournent sur le marché du travail.

L’analyse intersectionnelle nous permet de mieux comprendre d’où vient cette divergence entre l’expérience de tant de personnes et la perception générale. Prenons l’exemple d’une femme vivant dans une communauté rurale, dans une situation d’emploi instable, sans accès aux moyens de transport et qui veille à la sécurité alimentaire de sa famille. Nous savons que son expérience diffère significativement de celle d’une femme vivant dans une situation économique stable en milieu urbain doté d’un système de transport en commun. Parlant de justice économique et de genre, nous savons que les femmes noires, autochtones et de couleur (PANDC) ont été les plus affectées durant la pandémie. Les secteurs de la santé, du tourisme et des services ont connu les plus importantes pertes d’emplois de tous. Ce sont aussi les secteurs qui offrent souvent les emplois les plus précaires, majoritairement occupés par des femmes PANDC.

C’est pourquoi les efforts d’organismes comme ONN sont si importants. En adoptant le langage mis au point par ONN et en finançant des organismes dirigés par des femmes et travaillant auprès d’elles, nous sommes en mesure de doubler les retombées de nos contributions. D’abord, nous pouvons encourager le travail décent pour les membres du personnel de ces organismes qui s’identifient comme femmes. Puis, nous pouvons appuyer les programmes conçus pour les femmes, les filles, les personnes bispirituelles et les personnes de diverses identités de genre.

Cependant, il serait aussi intéressant de revenir à la formulation de la question et de la poser par rapport à d’autres secteurs dont la main-d’œuvre n’est pas constituée majoritairement de femmes. Je pense qu’il est tout aussi important de développer un système (en anglais) dans lequel les femmes intègrent les secteurs aujourd’hui dominés par les hommes. Pensons aux sources de richesse et aux personnes qui prennent les décisions d’investissement. Tout cela doit changer aussi. La plupart des investisseurs providentiels sont des hommes qui investissent principalement dans l’entrepreneuriat masculin. Pourtant, les femmes doivent avoir accès au capital ET avoir voix au chapitre dans les décisions de (re)distribution des fonds, en plus d’en bénéficier. Tout le système doit être transformé.

Les fondations communautaires comme bailleurs de fonds

  1. Le secteur a clamé haut et fort qu’il ne pourra seul réaliser des conditions de travail décent. Il dit pouvoir faire sa part, mais avoir besoin de l’aide des bailleurs de fonds, dont les fondations communautaires. Ces dernières jouent plusieurs rôles comme employeurs, bailleurs de fonds et leaders communautaires, et ces responsabilités importantes se traduisent par une influence importante. D’après vous, sur quels aspects le réseau de fondations communautaires s’est-il démarqué et que peut-il faire mieux?

Au cours de la dernière année, à FCC, le langage est devenu un sujet récurrent dans nos conversations. Personnellement, j’ai vraiment développé un intérêt pour l’évolution du langage, son importance et ses nuances. À FCC, nous sommes entrés dans une réflexion profonde sur les aboutissants du langage : les actions sous-entendues, les personnes considérées, l’urgence véhiculée et les non-dits.

Donc, j’aimerais m’exprimer sur le langage utilisé par le secteur, la façon dont il se positionne. Il s’agit là d’un aspect à améliorer. Prenons l’exemple des stages étudiants. Les organisations à but lucratif annoncent ces stages dans un langage descriptif, p. ex. « nous offrons aux étudiants d’innombrables occasions d’apprendre, de s’épanouir et de travailler dans un but précis en découvrant différents environnements et technologies ». Ou encore, « tu pourras développer de nouvelles compétences, créer des contacts dans ton domaine d’études et franchir des étapes sur ton parcours professionnel ». À l’opposé, dans le secteur des OBNL, le langage utilisé envoie plutôt un message de manque de ressources, p. ex. « un stage conçu expressément pour renforcer les capacités de notre OBNL ».

Le secteur des OBNL n’a rien à envier aux autres, il est géré par des professionnels. J’espère que la plupart des fondations communautaires appuieront les pratiques de travail décent, tant à l’interne qu’au sein de leurs réseaux, y compris leurs bénéficiaires. Certaines fondations communautaires utilisent le programme Signes vitaux pour comprendre à combien s’élève le salaire de subsistance dans leur communauté. Munies de ces connaissances, elles demandent ensuite à leurs bénéficiaires si le salaire versé à leurs employés respecte ce montant. Si ce n’est pas le cas, les fondations leur fournissent le financement pour le faire. Donc, elles exigent des organismes de faire mieux et les aident à le faire. Il s’agit d’une approche extraordinaire et j’espère que plus de fondations communautaires adopteront des pratiques semblables. 

À FCC, nous demandons également aux fondations communautaires dans certains de nos programmes d’ajuster leurs façons de faire. Ainsi, dans le programme Communautés pour l’égalité des genres, nous demandons aux fondations d’embrasser pleinement les valeurs de l’initiative, ce qui passe par leurs propres changements institutionnels. Concrètement, elles vont adopter des pratiques d’investissement dans une optique de genre, réviser leurs politiques et pratiques de gouvernance et de gestion des ressources humaines, et déterminer l’aspect équitable de leurs programmes. Les membres de la première cohorte du programme multiplient les efforts et font un travail incroyable, tant dans leurs communautés que dans leurs propres organisations. 

  1. FCC était parmi les signataires d’une déclaration commune publiée au début de la pandémie demandant plus de financement et de flexibilité. D’après vous, comment ce message a-t-il été reçu? Pensez-vous plutôt à une réponse à court terme dans le contexte de la pandémie ou à une solution à long terme? Comment une plus grande flexibilité pourrait-elle aider à financer des pratiques de travail récent?

D’après ce que nous avons observé dans le réseau des fondations communautaires, le message a été bien reçu. La plupart des fondations étaient en mesure de fournir rapidement des fonds d’urgence avec beaucoup de flexibilité. La solution à long terme se trouve dans la philanthropie fondée sur la confiance. C’est-à-dire que nous devons intégrer dans nos processus et nos politiques les valeurs que nous prétendons défendre, pas seulement à des activités ponctuelles. Pendant la pandémie, et surtout pendant les premiers mois, nous avons été témoins d’une grande ouverture envers la philanthropie fondée sur la confiance et la philanthropie féministe. Des pratiques d’octroi de fonds plus inclusives ont également fait leur apparition, entre autres avec l’acceptation de demandes de financement verbales. L’optimiste en moi veut croire que nous vivons un moment de transformation. Les signes positifs ne manquent pas : les gens parlent d’expériences, de programmes pilotes, de subventions sans condition, de subventions pluriannuelles, de financement d’exploitation et de l’éducation des donateurs. L’avenir semble très prometteur.

Sauf que nous savons que les processus peuvent nous rattraper et nous faire ralentir. Le monde a fondamentalement changé; nos communautés ont changé. Par conséquent, nos pratiques doivent suivre et évoluer à une vitesse qui respecte l’urgence présente dans la collectivité. Pour ma part, j’aimerais que les fondations communautaires intègrent davantage les principes exposés dans la déclaration. La pandémie a montré que nous sommes capables de nous adapter rapidement et de changer nos pratiques pour répondre aux besoins de la collectivité. L’occasion est belle pour consolider les pratiques qui permettront de transférer le pouvoir, de décoloniser la philanthropie et d’asseoir l’équité.

Les fondations communautaires comme employeurs

  1. Comme présidente, comment passez-vous de la parole aux actes? Quels problèmes rencontrez-vous en voulant développer une culture de travail décent? De quoi êtes-vous le plus fière?

Je fonde beaucoup d’espoir sur le fait que les discussions engagées et les décisions prises par FCC et moi-même tous les jours au sujet de l’équipe et de notre milieu de travail ont comme priorité absolue l’intérêt de l’organisation et de ses gens. Je crois vraiment que la force de FCC réside dans les merveilleuses personnes qui composent notre équipe. En dépit des changements évidents, notre équipe est restée forte tout au long de la dernière année et demie. Je suis fière de travailler avec cette équipe de tonnerre composée d’humains formidables qui font non seulement du bon travail, mais qui se soutiennent mutuellement, sans parler de leurs amis et familles, de notre réseau et de nos communautés. Au cours de 18 derniers mois, plus que jamais, les membres de notre équipe se sont engagés à fond pour FCC, que ce soit à partir de leur table de cuisine, de leur sofa, de leur balcon ou d’un bureau aménagé au sous-sol. Ensemble, nous avons célébré le succès de nos programmes, la naissance de bébés ou des déménagements à l’autre bout du pays. Ensemble, nous avons vécu des jours difficiles et soutenu nos collègues qui ont perdu des proches, avaient le cœur brisé ou n’en pouvaient plus de la lourdeur imposée par la pandémie. Ensemble, nous avons échangé des recommandations et mots de passe pour Netflix; nous avons discuté d’endroits où trouver du papier hygiénique ou se faire vacciner, de programmes d’entraînement et de livres pour nous faire du bien; et nous avons dansé, pris des cafés et mangé de la pizza, voire de la crème glacée sur Zoom. Notre équipe a également honoré notre raison d’être de tant de façons. Au cours des 18 derniers mois, elle s’est battue pour FCC et nous a tenus responsables de l’avenir que nous travaillons tous à réaliser, soit un avenir qui est équitable, juste et viable. Je suis reconnaissante envers chacune et chacun de l’engagement qu’ils démontrent avec leurs questions, leurs idées, leurs expertises et leurs suggestions. Pour moi, il est clair que les membres de l’équipe de FCC sont et ont toujours été sa plus grande force.

J’espère que nous sommes à créer un milieu de travail où, peu importe la couleur du jour – des plus lumineux aux plus sombres, chaque membre d’équipe est reçu avec bienveillance. Je pense aussi qu’il est important de parler des jours et des moments qui sont difficiles.

Personnellement, j’ai de la difficulté avec l’idée voulant que « ce soit correct de ne pas être correct ». En fait, une partie de moi est entièrement d’accord. Je veux que notre équipe et notre réseau le sachent, y croient et l’appliquent. Je veux qu’ils sachent que je les soutiendrai, les défendrai et les écouterai les jours où ils ne sont pas corrects. La difficulté survient quand j’applique cette idée à moi-même les jours où ça ne va pas. Pour être honnête, je sais que je ne l’applique pas aussi bien à moi-même. Je ne montre pas que c’est correct de ne pas être correct, je ne m’accorde pas l’espace nécessaire pour laisser libre cours à mes émotions. Entre autres, parce que je ne sais pas ce qui arrivera si je laisse apparaître une seule fissure, de peur de ne pas être capable de l’arrêter. Cette année, j’ai souvent eu l’impression que je ne faisais que colmater une fissure après l’autre au fur et à mesure qu’elles apparaissaient. Je sais que c’est un aspect que je devrai améliorer afin de devenir plus bienveillante envers moi-même.

Les fondations communautaires comme leaders communautaires

  1. La collaboration est indispensable au renforcement des mouvements et aux changements systémiques. Comment les bailleurs de fonds et les bénéficiaires peuvent-ils collaborer pour renforcer le mouvement pour le travail décent, l’égalité des genres et la justice raciale dans notre secteur? Comment votre réseau peut-il montrer le chemin à d’autres bailleurs de fonds?

Selon mon expérience, nous (l’ensemble du secteur des OBNL) sommes surtout à l’aise dans les conversations et les actions que l’on pourrait qualifier (globalement) d’optimisation. L’optimisation, c’est l’effort d’utiliser au mieux, ou le plus efficacement possible, une situation ou des ressources. C’est une bonne chose par moment. À FCC, nous nous sommes posé la question suivante : et si, au lieu de chercher l’optimisation, nous aspirions à la transformation? La transformation, c’est le fait et le processus de changer du tout au tout. Il s’agit d’une question pertinente pour le travail philanthropique et comment nous le pratiquons, et plus particulièrement pour les cultures et les environnements de travail que nous cultivons.

Je pense que dans le milieu philanthropique, nous parlons souvent de virages ou de changements comme s’il s’agissait de transformations… Mais en réalité, nous jouons de prudence avec des changements qui servent à optimiser. Dans un article au sujet de la COVID-19 paru dans le New York Times (en anglais), on écrivait qu’« il est plus facile d’ajouter continuellement des exceptions et des justifications à une conviction, pour admettre plus tard qu’une meilleure explication existe ailleurs. » Je pense qu’il en va de même pour les solutions et les méthodes que nous utilisons en philanthropie. Souvent, il est plus facile de continuer à brasser ou à modifier une « solution » existante que d’admettre que d’autres ont pensé à meilleures solutions. Cette question fait partie de nos discussions à l’interne sur notre travail et sur l’organisation au moment présent et à l’avenir. Il est facile d’en parler, mais l’appliquer équivaut à un geste radical. Je crois que nous sommes prêts.

Le fait de reconnaître clairement ses erreurs fait aussi partie de ce travail, comme nous l’a montré l’exemple de la Coalition pour le secteur communautaire. Cette initiative avait été lancée sous le leadership d’un certain nombre d’organismes nationaux, dont plusieurs représentent la réalité d’un secteur dirigé par des Blancs. Nous n’aurions jamais dû participer à un processus qui perpétue des problèmes que notre travail cherche à résoudre. Cette erreur nous a poussés à agir, l’organisation et moi-même en tant que dirigeante, sur notre façon de participer à de telles initiatives, y compris le choix des initiatives auxquelles nous voulons participer. Nous avons alors convenu de participer uniquement à des coalitions, des consortiums et des collaborations qui comptent sur des équipes de dirigeants diverses pour toutes leurs activités et décisions. La Coalition a reconnu le manque de diversité, mais à FCC, nous avons cru bon aller plus loin. C’est pourquoi nous avons reconnu publiquement notre erreur, d’abord pour être transparents, mais aussi pour encourager quiconque à nous demander des comptes.