Le présent texte s’inscrit dans notre série sur le Fonds d’urgence pour l’appui communautaire. Nous démontrons comment ce programme de financement fédéral de 350 millions de dollars soutient les populations vulnérables touchées de manière disproportionnée par la COVID-19.


Au cours de la dernière décennie, la solitude a été reconnue comme un problème de santé publique qui augmente le risque de mortalité à un taux plus élevé que le tabac ou l’alcool. Les mesures de distanciation physique dues à la pandémie ont entraîné une forte augmentation de la solitude. En 2019, une étude avait révélé qu’un peu plus de la moitié des Canadiens considéraient avoir une bonne vie sociale. Pendant la pandémie de COVID-19, ce chiffre a chuté à 33 %.

Certaines communautés sont davantage exposées au risque d’isolement social, notamment les personnes âgées et celles à mobilité réduite. Depuis le début de la pandémie, des organismes à but non lucratif et de bienfaisance partout au Canada s’efforcent plus que jamais de soutenir ces populations vulnérables.

Pour appuyer leurs efforts, Fondations communautaires du Canada a accordé du financement à près de 5 000 projets par l’entremise du Fonds d’urgence pour l’appui communautaire (FUAC). Remarquons que plus de 3 200 de ces projets portent directement sur l’isolement social et la santé mentale.

La guérison par les loisirs

L’ElderActive Recreation Association est une des organisations financées par le FUAC. Établi à Whitehorse, cet organisme à but non lucratif vise à motiver les Yukonnais âgés de 55 ans et plus à mener une vie active grâce à des activités sportives, culturelles, éducatives et créatives.

Alex Jegier, directeur général, explique que les communautés du nord du Canada étaient « déjà assez isolées » avant la pandémie de COVID-19. Par conséquent, la programmation d’ElderActive est devenue encore plus cruciale, mais sans les possibilités de collecte de fonds habituelles, « nous savions que nous ne pourrions pas offrir le même nombre d’activités ».

ElderActive a donc décidé de faire équipe avec la division de l’Association canadienne pour la santé mentale du Yukon (ACSM-YT) pour présenter une demande de financement au titre du FUAC. « En raison de notre partenariat avec l’ACSM, [nos programmes] touchent à la santé mentale et au mieux-être », précise M. Jegier. Ceci est particulièrement important, car les études révèlent que 65 % des habitants du Yukon déclarent avoir une très bonne santé mentale, par rapport à 71 % dans le reste du Canada. « Nous offrons des programmes de mieux-être, comme des exercices de tai-chi et un cours d’art avec un art-thérapeute de l’ACSM. »

Une grande partie de la programmation de cet organisme à but non lucratif se déroule à Whitehorse, mais la densité de population au Yukon est d’environ 0,1 personne par kilomètre carré et l’accès à Internet est limité dans les régions rurales.

ElderActive a utilisé une partie du financement du FUAC pour améliorer l’accessibilité de ses événements en encourageant les personnes à se joindre à ses cours d’art par téléphone plutôt que par Internet. « Nous avons reçu des fonds pour offrir cette option au moyen d’un numéro sans frais », explique M. Jegier.

La réaction de la communauté a été immédiate. « [On] nous remercie d’avoir diversifié notre offre et rapproché de nouveau la communauté – en respectant une distance de deux mètres! », blague-t-il.

Du soutien pour les Canadiens sourds et aveugles

Un autre organisme financé par le FUAC qui lutte contre l’isolement social est le Resource Centre for Manitobans who are Deaf-Blind (RCMDB). Établie à Winnipeg, cette organisation travaille avec des adultes sourds-aveugles pour promouvoir leur indépendance par des services d’aide à la vie quotidienne, la défense de leurs droits, l’éducation du public et plus encore.

On estime que la surdicécité touche environ 1 Canadien sur 3 000, et les services du RCMDB reposent en grande partie sur des interactions en personne. En raison des mesures de distanciation physique contre la COVID-19, l’organisation a dû réévaluer son approche.

Bonnie Heath, directrice générale, explique que, normalement, le RCMDB aide les personnes à accomplir des tâches comme faire l’épicerie. « Nous tentons actuellement de déterminer comment assurer la sécurité du personnel », explique-t-elle.

Grâce au FUAC, le RCMDB a pu embaucher et former de nouveaux fournisseurs de services de soutien dans le but d’accroître l’inclusion sociale et de fournir un soutien en matière de santé mentale. « Il s’agit simplement d’un fournisseur de services de soutien qui s’emmitoufle avant de se rendre chez la personne pour marcher dans le quartier avec elle, car elle ne peut pas se déplacer [seule], précise Mme Heath. Nous allons former davantage de fournisseurs de services de soutien afin d’éviter l’épuisement de notre personnel, car personne ne sait combien de temps la pandémie va durer. »

Le soutien que les clients obtiennent auprès du RCMDB change leur vie. Mme Heath cite Magnus Kincaid, membre de la communauté et ancien militaire : « Le RCMDB est devenu un point d’ancrage dans ma vie, comme un port en pleine tempête quand j’en avais vraiment besoin. C’est un endroit où on peut trouver refuge, être aimé et trouver sa propre famille. »

Regard vers l’avenir

Quand est venu le temps de distribuer le FUAC, Fondations communautaires du Canada a sélectionné des organismes ayant adopté un mandat digne du concept « rien à propos de nous sans nous ». Il se trouve qu’il s’agit de la devise du RCMDB. « Le personnel est guidé par un comité directeur dont la majorité des membres sont sourds-aveugles, explique Mme Heath. Grâce à leurs conseils, le travail est relativement [simple]. Ils déterminent toujours leurs besoins. »

Puisque des compétences spécialisées sont requises, le RCMDB ne peut pas compter uniquement sur des bénévoles. Mme Heath souligne l’importance d’un financement continu pour la formation de nouveaux employés, qui « font tout, de la marche aux activités récréatives, [avec les clients] ».

Afin de décider la meilleure façon d’utiliser le FUAC, ElderActive a mené un sondage auprès de la communauté pour déterminer ce dont ses membres avaient le plus besoin. Plus de 700 aînés et soignants ont répondu qu’ils voulaient des programmes accessibles axés sur le mieux-être. Les résultats du sondage ont directement motivé le partenariat d’ElderActive avec l’ACSM-YT. 

M. Jegier déclare que, même si le financement du FUAC est bénéfique, il doit maintenant réfléchir aux prochaines étapes. « Nous avons commencé à discuter avec d’autres organisations et gouvernements pour démontrer notre impact actuel et celui que nous continuerons d’avoir. »